COP 21 :

Un traité international « contraignant » n’est pas envisageable

N’en déplaise au président français, l’accord international qui sera signé à Paris à l’issue de la conférence mondiale sur le climat en décembre ne sera pas « contraignant » au sens d’un traité comme celui de Kyoto, tout simplement parce que ce n’est pas possible.

En déclarant le 11 novembre au Financial Times qu’il n’y aura « pas d’objectifs de réduction juridiquement contraignants comme cela avait le cas à Kyoto », le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, a simplement dit ce que tout le monde savait mais dont personne ne parlait. « Ce ne sera certainement pas un traité » (*), a ajouté John Kerry, faisant allusion au protocole de Kyoto, adopté fin 1997 y compris par les Etats-Unis, ratifié en 2005 mais pas par les Etats-Unis, lesquels n’ont pas plus de marge de manœuvre aujourd’hui.

Alors que François Hollande a aussitôt réagi en affirmant que l’accord serait contraignant ou ne serait pas, Laurent Fabius a été plus prudent. Le futur président de la COP21 a jugé possible de « discuter de la forme juridique de l’accord » mais que celui-ci devra comprendre « des dispositions juridiquement contraignantes », ce qui avait été acté en 2011 à Durban. Comprendre : l’accord peut bien être non contraignant mais comporter des dispositions qui, elles, le seront ! On se prend donc à imaginer un accord hybride comportant, par exemple, des objectifs volontaires de réduction des émissions qui seront vérifiés tous les cinq ans. Il est d’ailleurs probable que ces objectifs ne figurent même pas dans l’accord lui-même mais dans son annexe.

L’autre raison, c’est l’impossibilité de mettre en place un régime international de sanctions pour ceux qui ne respecteraient pas le traité. Outre le fait qu’un tel régime de sanctions serait inapplicable, il ne pourra faire l’objet d’un consensus de la part des 196 pays. D’ailleurs personne ne se hasarde à évoquer les sanctions mais plutôt la volonté des Etats de mener des politiques climatiques ambitieuses, sous leur propre responsabilité et dans leur intérêt. « C’est leur crédibilité qu’ils engagent », pense le climatologue Jean Jouzel. Par ailleurs, le scientifique « ne croit pas souhaitable d’aller vers un accord contraignant qui, de toute façon, serait difficile à appliquer et limiterait les ambitions d’autant que tous les pays du monde sont parties prenantes pour la première fois ».

Retour à la réalité le même jour à Manille : une quarantaine de pays parmi les plus menacés ont lancé un appel pour que la conférence de Paris aboutisse à un engagement plus sévère que la limitation à 2 degrés alors que les 3 degrés sont devenus la perspective la plus probable.

(*) the agreement will “definitively not going to be a treaty”

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Yves Leers

Journaliste spécialisé dans les questions d’environnement (AFP), conseil en développement durable (L’Atelier du climat), ex responsable de la communication et de l’information de l’ADEME.